vendredi 28 février 2014

Le cabinet des rêves 164


M. s'étonne que je n'aie pas encore remarqué la spécificité des trains espagnols. 
Je ne vois pas ce dont il veut parler. 
Mais, plus tard, je prends le train et je m'aperçois que, s'il ressemble effectivement à un train, il n'y a pas de voie ferrée, il roule directement sur la chaussée, exactement comme un bus. 
Je tente de réprimer un fou rire. 

Rêve du 20 février 2014

jeudi 27 février 2014

Chroniques casanières

la vieille dame rebelle
est ici chez elle 
dans le grenier ses livres clandestins d'antan
même Franco ne la fit pas renoncer au catalan

mercredi 26 février 2014

Là c'est le jour où j'ai vu un agneau tout neuf,


courir à travers le pré avec un enthousiasme de teckel et l'innocence de ceux qui ignorent qu'ils appartiennent à une espèce qui se cuisine.

mardi 25 février 2014

Tuesday self portrait

Quand je voyage, je veux voir des pays, pas des gens. On peut voir des gens dans le métro.

William Gaddis. Les reconnaissances

lundi 24 février 2014

Villes d'eau

des envies de villes m'arrachent le coeur
(parfois)
les ruelles de Lisbonne, les rives de l'East River, les ciels de Bruxelles, la foule de Tokyo, la grande bibliothèque de Montréal
je me soigne à Barcares comme d'autres à Vichy
avant de remonter sur ma terrasse en tête à tête avec le soleil
 en pensant à tous ceux qui vivent en ville et rêvent de la chambre avec vue qu'ils ont réservée sur l'île

dimanche 23 février 2014

Alone again

C'est vrai, je dois l'avouer. Quand ton voyage s'est confirmé, que ton absence s'est organisée, j'ai été tentée de t'être infidèle et de renouer clandestinement avec mes amours anciennes : la solitude, la liberté d'une vie en terre étrangère. 
Mais non. En fait non. 
Tu m'as changée. 

Sans tes baisers, pas de raison de m'attarder sur la plage des Français.
Pas davantage d'impatience à voir approcher l'heure du coucher. 
Pas l'envie de m'attabler à une terrasse où tu ne me rejoindras pas.

Puisque tu n'es pas là, je vis avec le soleil, avec les bêtes aussi, d'une pièce à l'autre selon les heures. 
C'est seule dans la maison que je réalise le mieux à quoi y ressemblait ta vie sans moi. 


samedi 22 février 2014

Une enquête sentimentale

Portez-vous une montre ?
De quel artiste le travail vous a récemment enthousiasmé ?
Y a-t-il une partie de votre corps qui vous fait régulièrement souffrir ?
Faites-vous des fautes d'orthographe ?
Avez-vous des ennemis ?
Quelle image vous vient à l'esprit quand vous pensez à l'hiver ?
Avez-vous le sens de l'orientation ?
Que faites-vous pour donner du piquant à un jour qui en manque ?
Gardez-vous un bon souvenir de vos dernières vacances ?
Regardez-vous les films étrangers en version originale ou doublés ?

Si vous aimez les enquêtes sentimentales, vous pouvez en écouter ICI 

vendredi 21 février 2014

Le cabinet des rêves 163

Le père de M. vient entreposer du matériel de canoë à la maison, dans la salle de bain. 
Il s'agit d'affaires encombrantes et ruisselantes d'eau. 
Or, dans la salle de bain, il n'y a plus de place : J.M. y a étalé une couverture sur laquelle il a posé le grille-pain en pièces détachées. 
En effet, il a voulu prendre son petit déjeuner exactement à sa convenance : dans le noir et sur une chaise haute de bar et, pour cela, il a entreposé ce qui le dérangeait dans la salle de bain. 
Je me demande comment on pourra se laver à l'avenir et je suis énervée. 
Je suis D. dans le couloir de la maison en essayant de me calmer.
En vain puisque, au passage, je casse une porte que je démonte de ses gonds. 
D. veut m'aider à la remettre et ne semble pas s'apercevoir que ma colère est provoquée par sa présence. 

Rêve du 11 décembre 2013

jeudi 20 février 2014

Chroniques casanières

à fréquenter l'atelier du portraitiste
ils se colorient tant et si bien
que dans la rue on devine qu'ils sont les chiens
d'un artiste

mercredi 19 février 2014

mardi 18 février 2014

Tuesday self portrait


Ce qui me ramène au bonheur et à son étymologie. 
Aujourd'hui, il s'apparente avant tout à un sentiment de plaisir et de contentement; une excitation, du piquant, l'estomac retourné, un sentiment agréable, juste, reposant, et vivant... enfin, vous voyez...
Mais des significations plus anciennes fondent le hap de happiness -happe en moyen anglais, gehapp en vieil anglais-, à savoir la chance ou la fortune, bonne ou mauvaise, qui vous tombe dessus. Hap, c'est le lot qui vous incombe, les cartes qui vous sont distribuées. La façon d'appréhender votre hap déterminera si vous pouvez être happy, heureux ou non. 
Ce que les Américains, dans leur constitution, appellent "la recherche du bonheur" (relevez bien qu'il ne s'agit pas du "droit au bonheur"), est le droit de remonter le courant, à la manière d'un saumon.
Jeanette Winterston. Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?

lundi 17 février 2014

dimanche 16 février 2014

blue valentine

Tu m'as dit que toi non plus, tu ne l'étais pas
:
 jaloux 
Pourtant vendredi à Formentor, tu l'as tué sans hésiter, 
celui qui devant toi avait osé 
m'embrasser 
sur la bouche.
(c'était comme une caresse quand tu t'en es saisi, du moustique, sur mes lèvres)

samedi 15 février 2014

Une enquête sentimentale

Cuisinez-vous parfois des plats que vous ne mangez pas ?
Etes-vous déjà tombé amoureux deux fois de la même personne ?
Vivez-vous bien les imprévus ?
Votre vue nécessite-t-elle une correction ?
Etes-vous
 souvent
rarement
jamais
tenté de penser Jamais deux sans trois ?
Vous arrive-t-il de faire une recherche sur internet à propos de personnes dont vous faites connaissance ?
Avez-vous déjà accroché sur un mur un puzzle que vous aviez réalisé ?
Rougissez-vous facilement ? 
Participez-vous volontiers à des concours ?
De quoi vous fait-on régulièrement compliment ?
Si vous aimez les enquêtes sentimentales, vous pouvez en écouter ICI 

vendredi 14 février 2014

Le cabinet des rêves 162


M. me dit Il faudrait inventer un tribunal pour tes gâteaux.

Rêve du 9 février 2014




jeudi 13 février 2014

Chroniques casanières

la porte du studio ne ferme pas à clef
mais nul ne s'avise d'y monter
mon seul invité mon unique visiteur
en mon absence y dépose parfois des fleurs

mercredi 12 février 2014

Là, c'est le jour où j'ai dit que la météo était un phénomène subjectif,

parce que j'aimais tellement y habiter que ce n'est qu'en arrivant à Lisbonne que j'avais réalisé que le temps passé à Bruxelles n'avait pas été aussi lumineux que je l'avais pensé et où il a renchéri en disant que lui, c'est parce qu'il s'était lassé de sa vie aux Canaries que tout à coup, non vraiment, vivre sans jamais changer de saison c'était devenu impensable. 

mardi 11 février 2014

Tuesday self portrait

J'ai commencé à apprendre le français. C'est une langue de tarés. Tu sais comment on dit gusano, verso, vidrio, vaso, hacia y verde ? Ver. Comment veux-tu que je comprenne de quoi ils parlent ?

Santiago H. Amigorena. Une adolescence taciturne

lundi 10 février 2014

la voix humaine

Tous deux me dirent la même chose : qu'ils avaient eu l'impression de reconnaître la voix de l'autre, alors qu'ils ne s'étaient jamais parlé, ne réalisant qu'ensuite que, cette familiarité, ils la devaient à l'écoute de leurs enquêtes sentimentales respectives.  
Quant à moi, en raccrochant, j'eus l'illusion de vivre dans un autre siècle. 
Car cela faisait depuis le mois d'août que je n'avais plus parlé à personne dans un téléphone. 

dimanche 9 février 2014

L'origine du monde

Ton bras tendu me désignait l'autoroute et je sais à quel moment de mes voyages en car je tournerai la tête pour nous voir
Chacun des lieux que tu me fais découvrir me fait penser aux jeux des points à relier : un jour, je saurai peut-être tracer une carte de l'île. 

Un autre jour de la semaine, c'était autour de moi que tu avais le bras. Dans ma jeunesse, je me serais bien vu avec une fille des îles.
Cette fille n'était pas moi, ce n'était pas une référence à mes origines mais j'ai souri en pensant à ce que certains appellent le destin

samedi 8 février 2014

Une enquête sentimentale


Assistez-vous 
souvent 
parfois 
très rarement
 à un coucher de soleil ?
Si vous ne l’êtes pas, pourriez-vous être comédien ?
Avez-vous déjà brutalement et définitivement mis fin à une dépendance ?
Ajoutez-vous plus souvent que vous n’en retirez des coordonnées dans votre carnet d’adresses ?
Vous a-t-on déjà fait la surprise d’une fête pour votre anniversaire ?
L'une de vos passions a-t-elle été suscitée par un enseignant  ?
Vous est-il déjà arrivé de monter dans une voiture décapotée ?
Avez-vous tendance à commettre des gaffes ?
Avez-vous l’habitude d’aller au bout de ce que vous entreprenez ?
De quoi était composé votre dernier repas ?

Si vous aimez les enquêtes sentimentales, vous pouvez en écouter ICI 
(merci à Wictoria pour sa participation amicale !)

vendredi 7 février 2014

Le cabinet des rêves 161

Bien avant le début de l'analyse, j'avais commencé à me réveiller la nuit pour les noter sur des carnets noirs qui ne me quittaient jamais. Très vite, j'étais arrivé à une telle pratique que les rêves me venaient tout écrits dans la main, y compris leurs titres. Quel que soit le goût que j'ai encore aujourd'hui pour ces énoncés secs et secrets où les reflets de mon histoire me semblent me parvenir au travers d'innombrables prismes, j'ai fini par admettre que ces rêves n'avaient pas été vécus pour être rêves, mais rêvés pour être textes, qu'ils n'étaient pas la voie royale que je croyais qu'ils seraient, mais chemins tortueux m'éloignant chaque fois davantage d'une reconnaissance de moi-même.
Georges Perec. Penser/classer
Je veux entrer dans un supermarché mais en suis empêchée par deux caissières que je crois être en train de faire du ménage avant de m'apercevoir qu'il s'agit d'un spectacle chorégraphié auquel assiste un petit public. 
A la fin du spectacle, je peux entrer. 
Il s'agit, en fait, d'un parc dans lequel sont installé des stands de cuisine. 
A gauche de l'entrée, on fait cuire des manjus mais je sais qu'ils sont sucrés et que je ne peux pas en manger.
Plus loin dans les allées, il n'y a plus que des étalages de poissons crus découpés en tranches. 
Il n'y a de prix indiqués nulle part et je comprends que tout est gratuit quand je vois des gens -presque uniquement des hommes noirs- se servir sans rien demander à personne. 
Je pense que ce n'est pas très hygiénique si tout le monde y met les mains. 
Malgré tout, je finis par, moi aussi, prendre un poisson. 
Il s'avère avoir un goût déplaisant et être compliqué à manger à cause du nombre de ses arrêtes. 
Pendant que j'essaie d'avaler une bouchée, le responsable du stand me dit que, chaque année, il espère pouvoir troquer du poisson contre un portrait mais que, cette fois encore, il n'y parviendra pas. 
Je comprends qu'il y a un portraitiste dans le parc. 
Je me dis que je pourrais proposer à M. de revenir avec lui afin qu'on se fasse dessiner mais je doute qu'il en ait envie. 

Rêve du 1er février 2014

jeudi 6 février 2014

Chroniques casanières

baisser d'un ton
est une inutile précaution
l'enfant qui dort
est aussi sourd qu'un mort

mercredi 5 février 2014

Là, c'est le jour où la première page de mon livre était numérotée 505...


Le ton général de l'ouvrage était celui de l'humilité, d'une espèce complaisante et un peu lourde, peut-être, dans le genre du chameau passant par le chas de l'aiguille. 
M. Pivner feuilleta les pages en jetant un coup d'oeil aux titres familiers. Techniques fondamentales dans la façon de traiter les gens... Six moyens de faire que les gens vous aiment... Douze façons d'amener les gens à partager vos idées... et dodelina de la tête. Il était très las. Pourquoi prêter tant d'attention, consacrer tant de temps à ce livre qui reposait sur son étroit giron ? M. Pivner trouvait une sécurité dans les chiffres; toute publication ayant un million de lecteurs le rassurait, et dans un pays où les maladies mentales frappaient plus de gens que tous les autres maux humains combinés, un tirage de quatre millions était plus rassurant que n'importe quoi : sur vingt-cinq citoyens de plus de quatorze ans capables de lire, l'un d'eux avait acheté ce livre, sans parler des multiples exemplaires déchirés, soulignés, qui avaient circulé parmi les vingt-quatre autres. 
William Gaddis. Les Reconnaissances, tome II
... et où j'ai croisé plus de trois personnes sur mon trajet quotidien.

mardi 4 février 2014

Tuesday self portrait

Tout être humain femelle n'est pas nécessairement une femme. Il lui faut participer à cette réalité mystérieuse et menacée qu'est la féminité. Celle-ci est-elle sécrétée par les ovaires ? Ou figée au fond d'un ciel platonicien ? Suffit-il d'un jupon à froufrous pour la faire descendre sur terre ?
Bien que certaines femmes s'efforcent avec zèle de l'incarner, le modèle n'en a jamais été déposé.
Simone de Beauvoir. Le deuxième sexe

lundi 3 février 2014

La lumière avait l'intensité d'une histoire d'amour*

*Jeanette Winterson. Garder la flamme

Dans le car je me souviens d'autres cars d'autres jours d'autres paysages
où j'aurais tout mais tout donné
pour que la destination toujours s'éloigne et que ne cesse jamais le voyage.

dimanche 2 février 2014

A lady of a certain age

Je ne sais pas si l'amour est un sentiment. Parfois je crois qu'aimer c'est voir. C'est vous voir.

Marguerite Duras. Emily L.
Les premiers jours, sur ton chevalet, je n'étais pas coiffée, pas maquillée, à peine habillée. 
Quand je traversais ton atelier, il me semblait me voir telle que toi, tu me vois, tous les matins. 

samedi 1 février 2014

Une enquête sentimentale

Que redoutez-vous le plus dans le fait de vieillir ?
Prêtez-vous volontiers vos affaires ?
Y a-t-il un moment de la journée qui vous parait systématiquement trop court ?
Ou trop long ?
Qu'est-ce qui, récemment, vous a donné l'impression de jeter votre argent par les fenêtres ?
Avez-vous 
souvent
parfois
jamais
l'occasion de parler une autre langue que votre langue maternelle ?
Conservez-vous les livres que vous n'avez pas aimés ?
Portez-vous ou avez-vous porté un bijou gravé de votre prénom ?
Quel est l'aliment dont vous vous passeriez le plus difficilement ?
Y a-t-il un objet de votre enfance qui fait encore pleinement partie de votre vie aujourd'hui ?
Elaborez-vous souvent des listes ?


Si vous aimez les enquêtes sentimentales, vous pouvez en écouter ICI