C'était pour échapper à l'ennui -il l'avoua ensuite- que l'enfant nous entretint d'immortalité, nous expliquant que, jusqu'à ce qu'il meure, rien ne l'empêcherait de croire qu'il en était doté.
Pendant que je le regardais -ses cheveux fraîchement coupés qui ressemblent à une fourrure et que j'envie, ses yeux si sombres qu'il plisse pour mimer la réflexion, son air buté prêt à la contradiction qui le quittera sans doute quand il n'aura plus l'âge de vouloir toujours avoir raison, sa manière de se tordre sur sa chaise afin de se tenir tout sauf droit, ce qui est le seul point commun avec toi que je lui vois- qu'il était bien étrange d'avoir envie de ne jamais mourir à l'âge où tant de moments déplaisants -les heures de cours, les repas avec nous et d'autres, bien d'autres j'en suis sûre- ressemblent à de petites éternités et qu'il faut beaucoup spéculer sur l'avenir pour se convaincre qu'on aura envie de le vivre longtemps.
Ce n'est que bien après -après la vaisselle, après le café, après tes baisers, après tes accords de guitare dans la cour ensoleillée- que j'ai réalisé que c'était exactement à son âge que je t'avais rencontré et que, malgré tous les désagréments de mes quatorze ans, j'aurais adoré, à ce moment-là, être immortelle si toutefois j'avais été sûre de pouvoir l'être avec toi.
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