Sauf en de rares occasions où je retrouvais au réveil quelques mots griffonnés dans un demi-sommeil et dont rien n'émergeait, le rêve entier et intact resurgissait d'un détail ou d'un mot au moment même où j'entreprenais de le transcrire, comme une image fulgurante à laquelle venaient instantanément s'associer toute une série de figures familières, de thèmes récurrents, de sensations étonnamment précises : chaque fois il me semblait que je captais avec une aisance enchanteresse ce qui avait été la matière même du rêve, ce quelque chose d'à la fois flou et tenace, impalpable et immédiat, tournoyant et immobile, ces glissements d'espaces, ces transformations à vue, ces architectures improbables. Même si, par cette mise en écriture définitivement pervertie par sa rigueur même, je m'excluais à jamais de la "voie royale" que ces rêves auraient pu être, il me semble que je me trouvais au coeur de cette "inquiétante étrangeté" qui façonne et élabore nos images de la nuit, au coeur d'une rhétorique précisément onirique qui me faisait parcourir tous les rêves possibles : des rêves cinglants, des rêves sans os, des rêves longs comme des romans, emplis de péripéties époustouflantes, des rêves fugaces, des rêves pétrifiés.Georges Perec. Le rêve et le texte in Je suis né.
Nous sommes à une table, M. et moi.
Je mange des fruits secs que je suis en train de décortiquer.
P. entre, au milieu d'un groupe de personnes qui montent à l'étage.
Quand M. la voit, il a une réaction de recul : Oh non ! Pas elle !
Mais P. vient vers lui et l'embrasse simplement sur la tempe.
Elle se tourne ensuite vers moi, s'approche très près et me demande : Tu me trouves vraiment grosse ?
Je suis un peu embarrassée pour répondre : elle est grosse, en effet !
Mais, comme elle est très apprêtée pour sa soirée, je biaise en la complimentant sur son style.
Avant de monter avec les autres, elle me dit : Oui parce que, sur la photo que t'avait montrée M., j'étais vraiment affreuse.
Rêve du 27 avril 2014
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