Gardant la pose en tailleur sur le ponton -depuis quand être voutée me demande davantage d'efforts que me tenir droite ? Un jour, simplement, je l'ai remarqué- pendant qu'il m'aquarellait -et c'était la première fois, m'a-t-il dit, qu'il trempait son pinceau dans de l'eau de mer- je regardais les villas de Formentor -au pied desquelles les vagues s'écrasaient en gerbes spectaculaires dont le fracas, ce jour-là, submergeait cette plage si réputée pour sa tempérance, sa belle transparence- et je pensais à la vie entre leurs murs -la lumière au réveil par la fenêtre, le petit déjeuner avec vue sur l'horizon, les traces fugitives des pieds sur les dalles claires au sortir de la piscine- mais je pensais surtout à mon heureuse nature qui ne me rend envieuse de rien, qui m'offre la définitive certitude que mon bonheur ne dépend pas d'une propriété privée et que m'éveiller à Formentor ne guérirait aucun de mes chagrins si jamais il m'arrivait d'en éprouver le moindre.
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