Adolf (c'est à dire Eichmann, car Hitler grandit lui aussi dans cette ville) fut élevé par sa tante, de même que sa soeur et ses trois frères cadets. On dit qu'il n'avait pas d'ami et passait son temps à lire. Cela expliquerait le génocide. Mais on dit aussi qu'il était le chef d'une bande qui s'en prenait aux petits Juifs. Cela expliquerait aussi le génocide.
(…) Il parcourt l'Autriche sur une grosse moto rouge. Il est heureux. Il apprend alors à boire et à faire l'amour, deux choses pour lesquelles il se passionnera le reste de ses jours. En 1932, un grave accident lui vaut une fracture de la main gauche et une double fracture du crâne. Cette main handicapée l'empêchera plus tard d'obtenir une distinction sportive rendue obligatoire par Himmler pour tous les SS : les radios de la fracture du crâne ont permis de l'identifier en 1960, en Argentine. Certains ont prétendu que cette fracture du crâne lui avait endommagé le cerveau : cela expliquerait le génocide. Je doute que le tribunal de Jérusalem consente à ramener la mort de centaines de milliers de personnes à un penchant pour la lecture en solitaire, une attirance pour les petits voyous et la conduite d'une moto rouge en état d'ivresse.
Harry Mulisch. L'affaire 40/61.
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