Les vétérans de la Sélection connaissaient bien tout cela. Ils en savaient long sur l'influence de la neige, des vents ou de la poudre sur les quantités de rêves, ils n'ignoraient pas non plus le rôle des secousses sismiques, de l'éclipse de lune ou de l'apparition des comètes. Le secteur de l'Interprétation comptait à coup sûr en son sein des maîtres prestigieux de l'analyse des songes, d'authentiques savants qui, derrière des visions où l'oeil ordinaire ne percevait que les incohérents gribouillis du cerveau, savaient déceler des significations aussi étranges que dissimulées. Pourtant, dans aucun autre secteur du Tabir Sarrail on ne trouvait parmi les employés des vieux briscards comme ces anciens de la sélection, capables de prévoir l'abondance ou la pénurie de rêves tout aussi facilement que les vieillards du commun pouvaient pressentir, à leurs douleurs rhumatismales, que le temps allait se détraquer.Ismaël Kadaré. Le palais des rêves.
Nous partageons la propriété, E. et moi, d'un petit studio où je vais moins souvent que lui et qui est très désordonné.
Alors que je m'y trouve, je constate que la porte du frigo est restée ouverte, qu'il est plein des ingrédients nécessaires à la préparation de mojitos.
Comme E. est là, assis, un peu ivre, je lui fais remarquer qu'il ne me prépare jamais de cocktails, à moi.
Rêve du 2 février 2015
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